Indemnisation du dommage corporel

Indemnisation dommage corporel

L’indemnisation du dommage corporel

La victime d’un dommage corporel, quel qu’il soit (d’un accident de la route, médical, du travail, de la vie …) peut prétendre à une indemnisation selon certaines conditions. L’indemnisation du dommage corporel est une étape primordiale pour la victime, car elle va lui permettre de compenser sa situation de handicap et reconstruire de nouveaux projets de vie.

La victime de dommage corporel peut avoir des incapacités de toutes sortes, perte d’autonomie, impossibilité de reprendre le travail, situation de dépendance ; et ainsi compromettre son avenir professionnel et personnel.

Le but de l’indemnisation du dommage corporel est d’améliorer la situation de la victime pour la replacer aussi près que possible dans la situation dans laquelle elle se serait trouvée si l’acte dommageable n’avait pas eu lieu.

En effet, les dommages corporels engendrent un grand nombre préjudices (physique, moral, économique…), mais aussi de besoins humains (assistance d’une tierce personne, soins…) ou matériels (besoin en appareillage, aménagement de domicile ou véhicule…), et l’indemnisation du dommage corporel doit être intégrale.

Obtenir réparation est indispensable pour préserver la dignité de la victime, souvent démunie, et lui assurer des conditions de vie adaptées.

Le dommage corporel ne bouleverse pas seulement l’état de santé de la victime, mais toute sa vie et celle de son entourage.

Être entourer d’un avocat spécialisé en matière de dommage corporel est donc essentiel pour que l’indemnisation de la victime ne soit pas sous-estimée, mais évaluée à sa juste valeur.

La nomenclature Dintilhac 

Au début de l’année 2005, le Président de la deuxième chambre civile de la Cour de Cassation, Monsieur Jean-Pierre DINTILHAC, a été chargé de constituer et de diriger un groupe de travail à qui a été confié le soin d’élaborer une nomenclature des préjudices sur les dommages corporels.

Ce groupe de travail avait pour mission d’établir une classification méthodique rassemblant différents chefs de préjudice selon un ordonnancement rationel tenant compte de leur nature propre, en matière de dommage corporel.

Le groupe de travail a repris à son compte la distinction avancée par le rapport Lambert-Faivre en 2003 entre «le dommage», qui relève de l’événement factuel, et «le préjudice», qui relève du droit et exprime une atteinte aux droits patrimoniaux ou extra-patrimoniaux subie par la victime.

Les différents postes de préjudices corporels de la victime directe

1°) Préjudice patrimoniaux

a) Préjudices patrimoniaux temporaires (avant consolidation) :

  • Dépenses de santé actuelles (D.S.A),
  • Frais divers,
  • Pertes de gains professionnels actuels (P.G.P.A).

b) Préjudices patrimoniaux permanents (après consolidation) :

  • Dépenses de santé futures (D.S.F),
  • Frais de logement adapté (F.L.A),
  • Frais de véhicule adapté (F.V.A),
  • Assistance par tierce personne (A.T.P),
  • Pertes de gains professionnels futurs (P.G.P.F),
  • Incidence professionnelle (I.P),
  • Préjudice scolaire, universitaire ou de formation (P.S.U).

2°) Préjudices extra-patrimoniaux

a) Préjudices extra-patrimoniaux temporaires (avant consolidation) :

  • Préjudice fonctionnel temporaire (P.F.T),
  • Souffrances endurées (S.E),
  • Préjudice esthétique temporaire (P.E.T).

b) Préjudices extra-patrimoniaux permanents (après consolidation) :

  • Déficit fonctionnel permanent (D.F.P),
  • Préjudice d’agrément (P.A),
  • Préjudice esthétique permanent (P.E.P),
  • Préjudice sexuel (P.S),
  • Préjudice d’établissement (P.E),
  • Préjudices permanents exceptionnesl (P.PE).

c) Préjudices extra-patrimoniaux évolutifs (P.EV)

3°) Préjudices des victimes indirectes en cas de décès de la victime directe

a) Préjudices patrimoniaux :

  • Frais d’obsèques (F.O),
  • Pertes de revenus des proches (P.R),
  • Frais divers des proches (F.D).

b) Préjudices extra-patrimoniaux :

  • préjudice d’accompagnement (A.AC)
  • préjudice d’affection (P.AF)

4°) Préjudices des victimes indirectes en cas de survie de la victime directe

a) Préjudices patrimoniaux :

  • Pertes de revenus des proches (P.R),
  • Frais divers des proches (F.D).

b) Préjudices extra-patrimoniaux :

  • Préjudice d’affection (P.AF),
  • Préjudices extra-patrimoniaux exceptionnels (P.EX).

 


Illustration de certains postes de préjudices en matière de dommage corporel

Dommage corporel : les préjudices

  • Les souffrances endurées

Selon la nomenclature Dintilhac, ce poste de préjudice a pour objet de réparer les souffrances endurées par une victime consécutives au(x) traumatisme(s) subi(s) du jour de l’accident jusqu’à la consolidation (préjudice temporaire). Lorsque les souffrances perdurent postérieurement à la consolidation, les souffrances «permanentes» seront indemnisées au titre du poste de préjudice du déficit fonctionnel permanent (DFP).

Cette nomenclature définit les souffrances endurées comme  » toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la victime durant la maladie traumatique, c’est à dire du jour de l’accident à celui de sa consolidation. En effet, à compter de la consolidation, les souffrances endurées vont relever du déficit fonctionnel permanent et seront donc indemnisées à ce titre».

Comment sont évaluées médicalement ces souffrances ?

Les souffrances endurées sont évaluées par un expert médical désigné par le Juge en cas de contentieux judiciaire ou par un médecin désigné par la compagnie d’assurance en cas de recours amiable.

Ces souffrances sont évaluées sur une échelle de 0 à 7 suivant l’importance des souffrances constatées par le médecin. Il est nécessaire que les médecins décrivent précisément les composantes des souffrances endurées. Ainsi, les souffrances peuvent être caractérisées par le traumatisme initial, les hospitalisations multiples, les interventions chirurgicales, les traitements médicamenteux, la longue rééducation, les différents phénomènes allergiques et le retentissement psychologique…

On ne peut que rappeler l’importance du rôle de l’avocat pour enrichir le débat médical, la victime étant souvent en situation de stress lors de l’expertise et surtout en situation d’inégalité face aux assureurs qui dans la plupart des cas sont assistés par des avocats spécialisés ou leurs médecins conseils.

Intervenir lors de l’expertise est essentiel, car c’est sur le fondement de l’évaluation médicale que l’avocat sera en mesure de solliciter une juste réparation des préjudices subis par la victime.

La plus-value apportée par l’avocat à ce stade de la procédure consistera dans la maîtrise des outils permettant de chiffrer l’indemnisation au plus près des droits de la victime.

  • Le préjudice esthétique

Le préjudice esthétique consiste en une altération de l’apparence physique aux conséquences personnelles très préjudiciables liées à la nécessité de se présenter dans un état physique altéré au regard des tiers. Le préjudice esthétique peut être temporaire ou permanent.

Le préjudice esthétique temporaire (PET)

Il s’agit d’un nouveau poste de préjudice apparu dans le rapport Dintilhac. Ici, l’altération de l’apparence physique ne sera que temporaire, c’est-à-dire avant la consolidation de l’état de la victime.

Ce préjudice est déterminé par l’expert dans le cadre d’une procédure judiciaire ou dans le cadre d’un examen par le médecin rattaché à la compagnie d’assurance de la victime ou du responsable des blessures.

Il conviendra de procéder à l’indemnisation de ce préjudice selon les mêmes modalités que le préjudice esthétique permanent.

Le préjudice esthétique permanent (PEP)

Les experts évaluent le préjudice esthétique au regard d’une échelle de 1 à 7 exactement comme les souffrances endurées, de très léger à très important.

Le médecin expert ne doit en aucun cas tenir compte de l’âge et du sexe du blessé, bien que cela a une incidence dans la demande d’indemnisation mais en aucun cas dans l’évaluation de l’échelle des valeurs.

Le préjudice esthétique sera ainsi constitué en cas de disgrâce d’une cicatrice, d’une boiterie ou encore d’une amputation.

Le préjudice esthétique permanent pourra avoir également des répercussions sur la vie professionnelle de la victime si celle-ci exerçait une activité professionnelle en contact avec le public, ou une activité pour laquelle le physique est déterminant. Ainsi, pour une hôtesse de l’air ou pour un mannequin, ce préjudice esthétique revêtira une importance toute particulière. Le préjudice esthétique sera indemnisé en lui-même, et fera également l’objet d’une compensation sur le plan des pertes de gains futures et de l’incidence professionnelle.

  • Préjudice de tierce personne

Le préjudice de tierce personne constitue un préjudice essentiel pour la victime. Suite à un accident, une victime peut se retrouver dans l’incapacité de réaliser seule les actes essentiels de la vie quotidienne (toilette, repas…).

Le recours à une aide humaine s’avère donc indispensable pour pallier sa perte d’autonomie. Elle permettra non seulement d’assister la victime dans les actes de la vie quotidienne qu’elle ne peut plus désormais accomplir seul, mais également lui apporter la surveillance nécessaire et ainsi préserver sa sécurité et restaurer sa dignité.

L’indemnisation du préjudice de tierce personne permettra de financer cette aide humaine à hauteur des besoins de la victime.

Qui peut être cette tierce personne ?

La victime peut choisir toute personne pour l’assister. Il peut s’agir de toute personne physique ou morale (association …) y compris un membre de la famille (enfants, conjoint…) qu’elle soit rémunérée ou non.

Quelles tâches peuvent nécessiter l’assistance d’une tierce personne ?

Les besoins d’assistance et de surveillance peuvent être rendus nécessaires dans de nombreuses tâches de la vie quotidienne. On peut relever notamment :

  • Soins personnels :
    • Se laver,
    • Prendre soin de son corps,
    • S’habiller et se déshabiller,
    • Utiliser les toilettes,
    • Prendre soin de sa santé (prise de médicaments, rendez-vous…)…
  • Activités domestiques :
    • Ménage,
    • Linge (lavage, séchage, repassage, pliage),
    • Courses,
    • Repas,
    • Sorties, loisirs et vacances,
    • Gestion du budget et tâches administratives…

Dois-je justifier de mes dépenses à mon assureur pour obtenir le versement de l’indemnisation correspondant à ce type de préjudice ?

Le préjudice de tierce personne correspond à un besoin d’assistance ou de surveillance. Ce besoin est évalué par le médecin expert.

Pour des situations de lourd handicap, il est conseillé que l’évaluation des besoins de la personne soit réalisée par un ergothérapeute, qui sera le mieux placé pour apprécier et évaluer les besoins d’assistance et de surveillance nécessaires notamment en tenant compte de la configuration du lieu de vie de la victime.

L’indemnisation de ce poste de préjudice se fera à hauteur des besoins de la victime.

La jurisprudence a rappelé à de multiples reprises que ni l’assureur, ni le mis en cause ne sont en droit de subordonner le paiement de l’indemnisation à la production de justificatifs de dépense, ni même refuser l’indemnisation au motif que l’assistance ou la surveillance est réalisée par un membre de la famille y compris le conjoint, à titre gratuit.

Par ailleurs, l’aide humaine est un poste de préjudice autonome qui ne peut en aucun cas être remplacée par l’indemnisation de moyens techniques matériels (alarme…). Si les moyens techniques peuvent être nécessaires, ils seront indemnisés distinctement et ne pourront que constituer un complément du préjudice de tierce personne.

Et si j’ai besoin d’une aide humaine définitivement ?

Les besoins en tierce personne peuvent être limités et avoir disparu avant la consolidation des blessures.

Il se peut également que ce besoin perdure pendant toute la durée de vie d’une victime.

Cette tierce personne devra donc être évaluée par heure quotidienne ou hebdomadaire, puis capitalisée, c’est-à-dire évaluée sur l’espérance de vie prévisible de la victime afin qu’elle dispose d’un capital ou d’une rente suffisante pour couvrir ses dépenses en aide humaine tout au long de sa vie.

  • Frais d’adaptation de logement

L’accident subi par une victime a pu engendrer chez elle un lourd handicap qui nécessite de réadapter son environnement de vie. En effet, le handicap s’exprime chez une personne lourdement handicapée par une importante limitation de son interaction avec son environnement. Son logement qui était adapté, lorsqu’elle était valide et parfaitement autonome, ne l’est plus au regard de son handicap.

La victime peut donc obtenir une indemnisation destinée à lui permettre d’aménager son logement, ceci afin de compenser sa perte d’autonomie, et lui assurer un confort de vie.

L’indemnisation permettra par exemple de couvrir les frais d’aménagements concernant l’accessibilité des pièces du logement et des sanitaires, mais également d’équiper le logement de dispositifs électroniques permettant de pallier la perte d’autonomie (un monte escalier, par exemple) ou de l’acquisition d’un domicile mieux adapté prenant en compte le surcoût financier engendré par cette acquisition.

En outre, il est possible d’inclure au titre de l’indemnisation de ce poste de préjudice :

  • Les frais de déménagement et de ré-emménagement,
  • Les frais liés à un surcoût de loyer pour un logement plus grand induit par des difficultés de mobilité de la victime devenue handicapée,
  • Les frais de structure nécessaire à la victime handicapée afin qu’elle puisse disposer d’un autre lieu de vie, extérieur à son logement habituel, de type foyer ou maison médicalisée.
  • Frais d’adaptation de véhicule

Comme l’aménagement du logement, l’accident subi par une victime peut nécessiter d’adapter son véhicule à son nouvel handicap. En effet, une personne handicapée peut continuer à conduire un véhicule à condition qu’il soit adapté à son handicap, par un dispositif technique suffisant destiné à pallier sa perte d’autonomie.

Pour les personnes atteintes de tétraplégie, il s’agira par exemple d’installer un accélérateur et un frein sous le volant en lieu et place des pédales classiques, adapter le véhicule pour lui permettre de l’accueillir en fauteuil roulant, etc ….

Toutes ces installations engendrent des frais importants qui constituent un préjudice pour la victime qui doit être indemnisée.

Son indemnisation peut être sollicitée auprès de l’assureur à l’appui d’un recours en indemnisation amiable ou judiciaire .

L’indemnisation de ce poste de préjudice comprend notamment :

  • Les dépenses liées à l’adaptation d’un véhicule, mais aussi le surcoût d’achat d’un véhicule susceptible d’être adapté ;
  • Les surcoûts liés au renouvellement du véhicule et à son entretien…

Sont assimilés à ces frais d’adaptation, les surcoûts en frais de transport rendus nécessaires à la victime en raison de ses difficultés d’accessibilité aux transports en commun, survenus depuis le dommage corporel. Mais la jurisprudence indemnise notamment au titre des frais d’adaptation de véhicule, les frais liés à la nécessité de passer un permis spécifique.

Pour aller plus loin :

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