Allocation d’Autonomie : Bonne nouvelle pour les victimes d’accidents, Mauvaise nouvelle pour les assureurs !

La Cour de cassation vient de mettre un terme à l’attente portée du principe de réparation intégrale des préjudices au bénéfice des victimes et en corrigeant les erreurs de la Cour d’appel qui avait donné raison aux assureurs qui eux-mêmes avaient convaincu certains avocats qu’il fallait déduire l’Allocation de Personnalisée d’Autonomie (APA) du préjudice de tierce personne.

Nous conseillons donc aux avocats qui ont signé des transactions amiables avec des assureurs de dénoncer ces accords, afin que les compagnies restituent aux victimes ce qu’elles ont déduit, sachant au demeurant que les sommes en jeu sont importantes !

D’autant que cette allocation date de la loi du 20 juillet 2001, concernant les personnes de plus de 60 ans qui se trouve dans l’incapacité d’assumer les conséquences du manque ou de la perte d’autonomie liés à l’état physique ou mental.

Donc l’APA permet de recevoir une allocation dès lors qu’une personne a besoin d’aide pour accomplir les actes essentiels de la vie quotidienne : se lever, se laver, s’habiller, faire les courses, la cuisine, le ménage, le linge…, et dont l’état nécessite une surveillance régulière.

Ainsi pour illustration :
Après une expertise médicale, les besoins en aide humaine pour la victime sont évalués à 18h/semaine avant et après consolidation.
Avant consolidation, l’indemnisation est de 100 000 € sur 5 ans, mais durant cette même période la victime a perçu, du Conseil Départemental, l’Allocation Personnalisée d’Autonomie pour un montant de 57 000 €.
La Cour d’appel fait les calculs suivants :
100 000 € – 57 000 € = 43 000 € revenant à la victime.

Pour la période post-consolidation, la Cour d’appel évalue le préjudice de tierce personne futur à 17 000 €, payable par trimestre par l’assureur, mais estime qu’il faut déduire l’APA que perçoit la victime d’un montant de 2 550 € par trimestre.
La Cour de cassation casse ! (Cass du 20/10/2016, n°15-17507).

Cette cassation est, en effet, pertinente. S’agissant de la loi BADINTER du 5 juillet 1985, sont récupérable sur le montant des préjudices d’une victime, les sommes qui ouvrent droit à un recours subrogatoire contre la personne tenue à réparation, et à condition que ces sommes présentent un caractère indemnitaire.

L’APA ne peut pas avoir un caractère indemnitaire, puisqu’elle ne figure pas dans la liste limitative prévue à l’article 29 de la loi BADINTER, et en conséquence l’assureur ne peut exercer un recours subrogatoire contre le Conseil Départemental pour récupérer la somme de 57 000 € au titre de la tierce personne avant consolidation (elle ne peut donc déduire cette somme du préjudice de la victime), et encore moins déduire la somme de 2 550 € par trimestre à vie.

Le recours subrogatoire pour les compagnies d’assurance est donc impossible dès lors que la prestation servie par un Département n’a pas de caractère indemnitaire, mais forfaitaire. A défaut, l’APA serait remboursée par la victime par imputation sur son dommage, et donc par amputation de son indemnisation !

Heureusement, le Cour de cassation a dit le droit et ce n’est que justice pour les victimes !

Dans le maquis des prestations versées, ici ou là, par la Solidarité Nationale au regard du handicap des personnes concernées, les assureurs sont à l’affut pour réduire le préjudice des victimes.
Est-ce vraiment étonnant ?

Méhana MOUHOU
Avocat de victime

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