Responsable ou victime d’un accident aux USA

Indemnisation USAResponsable de l’accident

  • Si vous êtes responsable d’un accident de la route aux USA il faut juste espérer que vous ayez eu un bon réflexe en entrant sur le territoire.

Je le dis d’expérience mais regardez l’annuaire et trouvez après la location de votre voiture, un avocat spécialisé soit : criminal law, soit personal injury.

Les 2 connaissent les règles.

Soit vous êtes responsable et votre faute de conduite est telle qu’elle vous enverra en prison, surtout s’il y a des victimes décédées… à moins que votre traduction immédiate devant le tribunal se termine par l’obligation de payer une caution avec un délai très court pour rapporter un chèque certifié : attention les cautions sont élevées en matière d’accident de la route et peuvent atteindre facilement 500 000 $

Ou trouver l’argent là est la véritable question ? Cela n’est pas trop ma partie, mais sachez qu’il existe des avocats qui pourraient vous aiguiller sur certaines sociétés américaines dont le prêt de la caution sera adossé à vos garanties absolues en France.

Sinon la famille, les amis, les banques françaises, etc.

 

  • L’incrimination ne sera pas débattue lors de votre déferrement devant le tribunal c’est-à-dire que le fond de l’affaire ne sera pas débattu, mais le juge aura devant lui le chef d’inculpation du Procureur : soit pour homicide involontaire (grave) (involuntary manslaughter) soit pour un degré de qualification moindre, conduite dangereuse ayant entraîné la mort.

En France ces 2 qualifications se regroupent dans l’homicide involontaire ; pas aux Etats-Unis, dont la première fait courir un risque de prison de plusieurs années, la seconde vous permet de retrouver la liberté possible au procès.

 

Victime d’accident aux Etats-Unis : comparution devant un jury

Si vous êtes victime de blessures et notamment de blessures graves et que le choix s’oriente vers un procès, soit qu’il n’y a pas eu de réussite de négociation avec l’assureur du responsable (les faits sont discutables, différend sur les questions juridiques ou différend sur le montant de l’indemnisation).

Voici quelques règles à connaître, dès lors qu’il est recommandé de comparaître pour respect pour le jury mais surtout parce qu’il est dans votre intérêt de répondre aux questions des avocats et d’y être préparé.

Le jury civil est prévu par le 7èmeAmendement de la Constitution américaine et donc le droit d’être jugé par des jurés, sauf si l’affaire est complexe et dès lors le juge peut récuser le jury !

Autre moyen d’éviter un jury est d’invoquer certaines règles fédérales de procédure civile et dans ce cas le droit d’obtenir une décision légale en recourant à l’arbitrage exécutoire pour s’opposer au 7èmeAmendement.

Attention, je ne dis pas que les français sont mal vus aux Etats-Unis, et que les jurés sont des gens ordinaires avec leurs préjugés. Pas du tout mais il y a toujours des abus. Je me souviens d’une affaire lorsque j’avais quelques années de barreau, un couple de français qui vivait dans l’Etat du Texas était définitivement rentré en France. Le mari qui tondait sa pelouse a été percuté alors qu’il était vu sous témoin par un rétroviseur immense d’un camion qui passait le long de la résidence et qui a cogné sur la tête de la victime.

J’ai été consulté après que le jury a rendu sa sentence, en rejetant toutes les demandes d’indemnisation de la victime française tétraplégique.

Comment est-ce possible ?

En première instance la victime avait obtenu 7 millions de dollars. En appel infirmation totale du jugement : 0 $ !

J’ai appelé l’avocat américain pour savoir ce qui s’était passé pour en arriver là. Réponse de l’avocat américain : j’ai bien montré les preuves de sa tétraplégie, même par vidéo mais le jury était agacé car à son sens, la victime se devait d’être présente. L’avocat américain me précisant qu’il avait écrit à plusieurs reprises à la victime pour se déplacer au procès, en vain.

La pauvre victime était à l’époque dans un centre de rééducation en France, faute de foyer médicalisé.

En claire, la règle de l’extrême prudence s’impose devant un jury et il vaut mieux connaître le Droit américain mais aussi les mœurs des tribunaux américains !

Déroulement du procès américain

Pour avoir assisté à des procès dans des affaires d’accident aux Etats-Unis avec blessures physiques, la première des choses à dire est que la sélection c’est une incroyable mécanique de précision dans le choix des questions et de l’interrogatoire des jurés. Tout dépend d’eux !

C’est le jury qui a toute votre indemnisation en mains. C’est lui qui décide, de qui est responsable et combien il doit payer. Le juge, n’est qu’un arbitre non par élégance mais un arbitre qui régule le procès, fait respecter le débat contradictoire et les limites des interrogatoires aux témoins.

En France aucun avocat n’a jamais appris dans les facultés de droit et dans aucune Université la manière d’interroger un témoin. Cela n’existe pas. Et pourtant dans beaucoup de procédures pénales notamment en matière criminelle, vous avez un nombre de témoins qui défile à la barre, mais également des policiers, directeurs d’enquête, experts médicaux, psychologues, témoins des faits ou non, témoins de moralité…

Justement arrêtons-nous sur les témoins de moralité, (extrêmement important sur l’issue de la peine).

J’ai épluché livres de droit à la bibliothèque du tribunal de San Diego en Californie, et je peux dire que c’est une mine incroyable et une véritable science, technique ingénieuse (comme on voudra) sur l’apprentissage du raisonnement de la dialectique questions-réponses, et dans la forme de l’interrogatoire.

Ex :une personne est accusée de violences conjugales. Un témoin de moralité (une femme) s’approche à la barre et fait l’éloge de l’accusé en indiquant le connaître depuis 20 ans, qu’il est son voisin, qu’il n’a jamais élevé la voix sur ses enfants et n’a jamais entendu de dispute, etc.

Question de l’avocat de la victime : Madame vous exposez donc que vous ne lui connaissez aucun acte de violence. Est-ce exact ?

Réponse : oui.

Question : est-il correct également de dire que vous connaissez bien l’accusé ?

Réponse : oui je le connais bien.

Question de l’avocat : est-il encore correct de dire que pour vous, cet homme est un homme non violent ?

Réponse : oui je sais qu’il est non violent. C’est correct.

Question de l’avocat : si vous apprenez que l’accusé a eu des démêlez avec la police et que lors de l’arrestation il a repoussé un policier qui tentait de le menotter et que ce policier a été blessé ; si vous apprenez que l’accusé a eu un différend avec sa première épouse et que celle-ci a déposé une plainte pour blessures et que le certificat médical évoque une blessure au poignet et une atteinte psychologique ; alors Madame diriez-vous, fort de ces éléments que l’accusé est non violent ?

Nous voyons ici toute la technique des avocats américains.

Soit le témoin continue de répondre qu’il n’est pas violent de son point de vue et alors son témoignage est totalement discrédité et elle apparaîtrait comme une menteuse qui veut protéger un ami, et pour les américains le mensonge devant un tribunal est impardonnable et se paie très cher.

Soit elle doit reconnaître qu’elle n’était pas au courant de ces précédents.

D’où la question de l’avocat qui anéantit son témoignage.

Madame dès lors que vous êtes informée des pièces à la disposition du tribunal que ces faits énoncés sont réels, objectifs, est-il alors correct de dire que cet homme n’est pas non violent mais violent ? Est-il correct de dire cela ?

Réponse du témoin : oui c’est un homme violent.

L’avocat a donc prouvé une violence d’habitude, il reste à prouver la culpabilité de cet homme envers la victime.

Revenons donc au juge dans un procès d’une victime d’accident e la route.

Je donnais cet exemple juste pour indiquer qu’en matière de préjudice, les experts cités peuvent être questionnés par l’avocat de l’autre partie sur l’entendue de tous les préjudices. Il faut donc être préparé, d’où l’exemple que je donnais sur la victime tétraplégique…

En France en matière de dommage corporel, comme on dit le juge est souverain et le plus souvent il entérine le rapport de l’expert.

Aux Etats-Unis, dans un procès de blessures, les experts, contre-experts peuvent être appelés à la barre.

Et surtout ce qui compte pour obtenir la meilleure indemnisation au-delà des blessures physiques incontournables, c’est d’obtenir des dommages punitifs contre le responsable de l’accident au regard de la gravité de son comportement dans la conduite de son véhicule et de l’accident qu’il a provoqué : plus son comportement est dangereux, plus le dommage punitif est élevé. Il y a donc une morale, typiquement américaine nous dirions un défaut de civisme que certains paient très cher ce défaut d’éducation sur la route.

Sélection du jury aux USA

Cela peut durer plusieurs jours. Précisément parce que les jurés sont interrogés par les avocats pour être sélectionnés.

En France les seuls procès où il existe des jurys sont des jurés de Cours d’assises : nom, prénom, âge, profession.

Vous n’avez pas le droit de poser des questions, chacun des jurés vient avec ses préjugés, dès lors que l’on a appelé cela la souveraineté populaire.

Aux Etats-Unis, et notamment dans le cas qui nous occupe, c’est aussi au nom du peuple, mais c’est beaucoup plus équitable. Vous devez savoir si la personne qui va juger, d’emblée n’a pas une dent contre vous. Vous désirez savoir si un juré a un préjugé sur la victime ou si vous êtes avocat adverse contre la compagnie d’assurance parce qu’il est en litige avec une compagnie, ou parce qu’il a du ressentiment contre les assureurs car lui ou un proche a été victime d’une compagnie.

En France, vous pouvez être jugé par un jury raciste, vous ne savez pas ; aux Etats-Unis, l’avocat doit tout faire pour connaître ce que le juré pense et cela c’est une vraie technique !

Le tout dans l’élégance de la question et de l’interrogatoire.

D’ailleurs justement encore une différence avec la France.

Pour plaider devant les Cours d’Assises en France, nous savons que lorsqu’un juré est tiré au sort par le président de la Cour, nous avons quelques secondes (le temps qu’il se lève et qu’il s’avance vers le Président de la Cour, à peine 20 mètres) pour prendre position, soit nous nous taisons et il sera juré d’assises soit nous prononçons l’unique formule qui ne tient qu’à un mot : « Récusé. »

Récusé : le Président répond, Monsieur ou Madame, vous êtes récusé par la défense.

Le premier juré, ne comprend pas pourquoi il est récusé, puisque personne ne connaît rien de lui, sauf son âge et sa profession, nom et prénom.

Le pauvre juré se dit que sa tête ne convient pas à la défense. Pourtant il n’a rien fait de mal mais d’ailleurs le mot « récusé » sonne trop comme « accusé », accusation.

Tout cela pour dire, pour avoir assisté à de nombreux procès que la formule américaine est beaucoup plus élégante ; l’avocat dit « you are excused », vous êtes excusé ! C’est quand même beaucoup plus noble !

Le rôle de l’avocat sera de disqualifier les jurés avec comme ils disent dans les prétoires américains « a potentially distorting background », nous dirons ici non pas des antécédents déformants mais des préjugés !

Le but : trouver le bon juré et ce processus de sélection est très sophistiqué, tenant compte de facteurs « raciaux », économiques, sociaux, et surtout à l’analyse des réponses des jurés…

Nous voyons bien l’importance du travail des avocats américains dans le cadre des procès et notamment de ceux intéressant les victimes d’un accident de la route.

Dommages et intérêts punitifs

L’importance d’une bonne sélection est capitale, car encore une fois il y a le dommage corporel direct à indemniser mais surtout à réclamer des dommages punitifs. Ces derniers dommages n’existent pas en droit français, mais nous militons pour que cela change afin que soit condamné l’auteur de l’accident à verser à la victime des dommages supplémentaires compte tenu d’une faute morale, civique grave dans le comportement et qui a détruit la trajectoire de vie de la victime en la laissant avec de lourds handicaps.

Certains Etats américains règlent le montant des dommages punitifs à proportion en moyenne de 5 fois la valeur des dommages et intérêts attribués à la victime, d’autres ne plafonnent aucun dommage punitif.

La procédure de dommages et intérêts est le plus souvent basée sur des précédents. Le but des dommages et intérêts punitif en matière d’accident de la route est chargé, contre les chauffards et dans d’autres domaines, contre les entreprises, ou personnes physiques dont le but est le plus souvent de les évincer du circuit économico-civique, nous dirons.

Rappelez-vous la condamnation du géant international américain Monsanto, détenu par Bayer qui n’a pas préféré transiger et qui l’a appris à ses dépens en comparaissant devant un jury de la Cour supérieur d’Oakland le 13 mai 2019 qui l’a condamnée à la somme de 2 milliards de dollars, pour un couple atteint d’un cancer, qui avait utilisé un désherbant au glyphosate produit par le groupe agrochimique.

Mais ce n’est pas tout, les époux qui ont obtenu un milliard chacun de dommage punitif, ont obtenu également pour leur préjudice économique, et souffrances, un préjudice moral de 55 millions de dollars compensatoires.

Le Roundup était donc bien la cause du cancer des plaignants, l’appel de Bayer aurait permis à la multinationale de réduire les dommages punitifs le 27-07-2019 par un juge fédéral. Le couple américain a donc obtenu in fine tout de même 86,7 millions de dollars.

Hypothèse d’école, un agriculteur à la retraite en France qui attaquerait la firme en France et qui prouverait son cancer ne percevra jamais plus que son dommage compensatoire qui sera évalué à peine, s’il est en vie, à 400 000 € alors et s’il décède, un préjudice d’affection pour son épouse de 40 000 € et pour ses enfants du fait du décès entre 15 000 € et 25 000 € !

Selon que l’on soit d’un côté ou de l’autre de l’Atlantique, les jugements sont plutôt salés pour certaines victimes, plutôt sucrés pour d’autres !

Nous avions prévenu, standards et digressions pour un petit éclairage sur le pays de l’oncle sam.

Maître Méhana MOUHOU
Avocat de victimes

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